La Religieuse

Suzanne, née d’une infidélité de sa mère, est une bâtarde dont on ne sait que faire. En la faisant entrer au couvent, sa mère envisage ses prières comme une rédemption. Suzanne sera donc punie pour une faute dont elle n’est aucunement responsable. Le monde monacal peut s’avérer impitoyable pour qui refuse de s’y plier. Si elle tente de s’y résoudre malgré tout, ce sera au prix d’une perte vertigineuse d’identité. C’est le récit d’une plongée dans sa mémoire intime que nous révèle la jeune novice. Enfermée à I’intérieur d’un autre soi-même, la jeune fille se débat. Pour cette prise de parole vive, Anne Théron fait du corps de la comédienne la caisse de résonance de la détresse du personnage, traversée par la voix des monstres qui la hantent. Marie-Laure Crochant, dont l’impeccable diction rend le texte limpide, est stupéfiante de présence. Elle irradie littéralement le plateau, et sublime ce redoutable réquisitoire, défense de tout corps empêché. Cette version du roman anticlérical, tout en organicité, nous en fait toucher sa brûlante intemporalité.