Pétrole

L’histoire de Pétrole suit celle de son auteur. En novembre 1975, Pasolini est battu à mort sur une plage d’Ostie. Affaire criminelle irrésolue. Le texte dactylographié auquel il travaillait depuis trois ans est alors retrouvé dans son bureau. Il avait enquêté longuement sur la mort mystérieuse de l’industriel Enrico Mattei, patron de l’AGIP puis de l’ENI, compagnie pétrolière nationale fondée par les fascistes… Son roman inachevé est celui du dédoublement, ou de la recherche d’identité. Carlo l’ingénieur, personnage central, se voit séparé en deux. Si Carlo 1 semble prêt aux plus fulgurantes ascensions sociales, Carlo 2, exécutant de toutes les basses besognes, entame une quête sexuelle frénétique et sans interdits. À travers cette double figure, Pasolini s’érige contre ce qu’il nomme le génocide de la bourgeoisie sur la classe populaire, à coups d’embourgeoisements insidieux. Ce poème littéraire est la peinture décalée de l’Italie des années de plomb, doublée d’une prédiction terrifiante sur l’avenir. Pétrole est un chantier interrompu pour cause d’assassinat. Sylvain Creuzevault saisit cet écrit fragmenté, semé de notes. Il en construit un théâtre passionné, entre bouffonnerie et effroi.